Directive Copyright Européenne: Premiers contacts avec l’ENL
Comme vous l’aurez probablement déjà vu, Iloth a déjà relancé sa campagne concernant la Directive Européenne sur le Copyright.
Le vote est Mercredi prochain entre 12h et 14h. La date butoir de soumission d’amendements au texte est déjà passée : Cela signifie que le 12 septembre, une séance plénière du Parlement Européen devra se prononcer sur un texte, et ses quelques 200 amendements proposés par les différents groupes politiques devront également être votés dans la foulée.
Les lecteurs anglophones trouveront un résumé de ces amendements triées par coalitions ici: https://juliareda.eu/2018/09/copyright-showdown/
De notre coté, les appels ont repris. Malgré une maigre équipe, nous avons réussi à joindre des personnes au sein de l’ENL français (RN/RBM), susceptible de bien entendre les craintes liées aux dérives de censure qui sont inhérentes au filtrage automatisé.
Il nous a semblé intéressant de relayer quelques informations issues d’un long échange constructif avec une des personnes travaillant sur ce dossier :
- Ils sont conscients des dérives possibles du filtrage proposé par l’Article 13, et en ce sens ont écrit des amendements visant à éviter le plus possible le recours à un “filtrage automatisé”.
- Pour y parvenir, celà passerait entre autres par laisser le choix aux plateformes de la solution de contrôle à mettre en place, pour ne pas imposer légalement un type de filtrage qui serait automatisé.
- Une autre alternative évoquée serait de ne bloquer un contenu à l’upload uniquement si le contenu a déjà fait l’objet d’une plainte d’un auteur au préalable (Pour ne pas que le contenu “revienne” 2 jours plus tard)
- La principale motivation derrière l’essence du texte et de l’Article 13 serait de privilégier l’expansion des plus petites plateformes (En fait les plateformes Européennes de manière générale) tout en sanctionnant sévèrement les gros acteurs qui ne voudront pas verser une rémunération correcte aux artistes (Youtube parmi les principaux).
- Le seul moyen qu’ils voient pour y arriver serait de passer forcément par le retournement de responsabilité de l’uploader (qui vient de l’ancienne directive e-commerce), à la plateforme qui permet d’uploader.
Il est à noter que dans les raisons qui ont permis cet échange constructif, nous nous sommes montrés respectueux, politiquement neutres et que nous avons apporté un regard technique à notre interlocuteur : Nous n’aurions pas été bien loin en nous montrant injurieux ou en prenant des raccourcis sans écouter notre interlocuteur.
L’objectif de faire entendre nos craintes semble bien rempli en tout cas.
Cependant, voici quelques réactions à posteriori concernant les points avancés lors de l’appel :
- Les solutions impliquant “moins de filtrage” ou “pas d’obligation de filtrage” semblent facilement détournables : si demain la solution la plus simple pour une petite plateforme est d’acheter à bas coût le filtrage automatisé ContentID de Youtube pour respecter la directive (qui ne le demande pourtant pas explicitement), elle le fera par simplicité / coût : personne ne va embaucher une armée d’employés pour contrôler “humainement” tout ce qui est mis en ligne.
- La solution pour éviter le “come back” d’un contenu en infraction nécessite quand même de filtrer tous les contenus en entrée, sinon comment détecter que le contenu déjà bloqué par voie “humaine” est revenu ?
- La portée ou les mécanismes exacts de généralisation d’un filtrage, bien qu’importants, ne sont pas aussi graves que le renversement historique de la responsabilité juridique des hébergeurs. Maintes fois et de façon argumentée, les institutions Européennes se sont prononcées pour garantir aux plateformes de publications cette marge de manœuvre : Celle-ci, destinée à ne pas transformer les plateformes en police et juges du Copyright, est un garde-fou contre une escalade de la censure car une plateforme menacée juridiquement est une plate forme qui va indéniablement bloquer par défaut pour se protéger, au détriment des artistes et même du patrimoine culturel européen. Nous pouvons déjà citer comme premières victimes Bach et, ironiquement pour l’Union européenne: Beethoven
- Justifier des mesures draconiennes comme destinées à “heurter les grands en faveur des petits” ne porte que peu de sens dans ce cas de figure. En effet, Google, au travers de sa plateforme Youtube dispose déjà volontairement de son filtrage ContentID qui répond aux critères de la proposition originale. Celui-ci fait déjà l’objet de maintes controverses et abus de pouvoirs systématiques avérés. Les victimes de ceux-ci ont toujours été les modestes créateurs dépendants d’une monétisation fragile, pas la plateforme : même si les exceptions comme la parodie ou la satyre sont bien spécifiées et clarifiées, celà n’empêchera pas les petites plateformes de faire comme le “gros Youtube”actuellement, en bloquant par défaut ce qui semble de près ou de loin litigieux.
Nos positions et nos craintes demeurent donc après cet échange, les arguments avancés ne nous semblent pas justifier les mesures liberticides proposées.
Nous continuerons dans les jours qui viennent de contacter les référents à ce sujet au sein des autres groupes majeurs du Parlement Européen. Nous aimerions pouvoir publier un compte rendu similaire pour les coalitions PPE, ALDE et S&D, si nos ressources nous le permettent. Il y aura également un débat à suivre en direct au parlement le Mardi après midi sur les amendements proposés par tous les députés ayant travaillé sur le sujet, avant le vote de Mercredi.
Nous vous suggérons vivement de contacter vos députés, de leur faire part de vos craintes, et d’avoir une discussion respectueuse avec ces derniers. Surtout si vous êtes en désaccord.
L’équipe d’Iloth
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